​Si nous n’en sommes pas encore à vous proposer, comme beaucoup de nos confrères, des numéros estivaux “spécial sexe”, Spot vous invite quand même cet été à une visite polissonne de Lyon… capitale des gaules !
Les mauvaises langues la disent froide, bourgeoise et catholique. Pourtant, sous des dehors parfois austères, Lyon sait, quand il le faut, être une sacrée coquine. Et ça ne date pas d’hier !
Dès le Moyen-Âge, la ville est un haut-lieu de la prostitution. Et ce ne sont pas les deux conciles qui s’y déroulent au XIIIe siècle (en 1245 et 1272-1274) qui vont y remédier, bien au contraire. Un prélat qui assiste au premier synode note ainsi avec humour que, si Lyon comptait trois ou quatre maisons closes à l’arrivée du pape Innocent IV, en 1244, elle n’en abritait plus à son départ qu’une seule… qui englobait toute la ville ! Le voeu de chasteté est donc diversement observé par les prêtres lyonnais.
Jusqu’à la Renaissance (et sans doute bien au-delà), les autorités ecclésiastiques sont ainsi confrontées à un épineux problème : la nuit, les clercs et même les prêtres de la primatiale Saint-Jean (Lyon 5e) s’échappent de l’enceinte fortifiée du cloître. Ils s’en vont, “tels des militaires en bordée, s’enivrer et forniquer dans les tavernes des ruelles mal famées du quartier de Saint-Georges”, note avec consternation à la fin du XIXe siècle l’historien (et prêtre) lyonnais Jean-Baptiste Martin.
Plus près de nous, l’église Saint-Nizier (Lyon 2e) a été le théâtre au XXe siècle d’un événement souvent considéré comme le point de départ des luttes sociales des travailleuses du sexe. En juin 1975, entre cent et deux cent d’entre elles ont occupé l’église pendant une dizaine de jours pour protester contre le harcèlement policier et les lenteurs des enquêtes sur l’assassinat de trois de leurs collègues. Derrière le slogan “nous sommes toutes des prostituées”, le mouvement a rapidement pris une ampleur nationale, au point que des occupations similaires eurent lieu à Paris et à Marseille et que les “filles de joie” lyonnaises reçurent la visite de Simone de Beauvoir.
Les mésaventures de Jean-Jacques place Bellecour
Aux amours tarifées, certains préfèrent cependant les délices interdits de la drague en plein air, voire de l’exhibitionnisme. Aux XVIIIe et XIXème siècles, la place Bellecour (Lyon 2e) est semble-t-il le lieu de prédilection pour ce genre d’activités nocturnes, notamment grâce à l’ombre protectrice de ses arbres.
En 1731, le jeune Jean-Jacques Rousseau y est abordé par un inconnu qui lui propose tout de go une séance de masturbation à deux… “Comme à Paris ni dans aucune ville, jamais rien ne m’est arrivé de semblable (…), il m’en est resté une impression peu avantageuse au peuple de Lyon, et j’ai toujours regardé cette ville comme celle de l’Europe où règne la plus affreuse corruption”, relatera bien plus tard le philosophe dans ses Confessions !
Si elles ont aujourd’hui quasiment disparu, les vespasiennes furent au XIXe et au XXe siècles, à Lyon comme ailleurs, d’importants lieux de rencontres homosexuelles. Celles de la place Antonin Poncet (Lyon 2e) étaient particulièrement réputées pour cela. Aujourd’hui, même si cette pratique a tendance à être supplantée par les applications de rencontre en ligne, on drague encore en plein air sur les quais du Rhône, au parc de la Feyssine (Villeurbanne) ou dans celui de Gerland (Lyon 7e).
Signalons enfin aux amateurs et amatrices que Lyon compte plusieurs établissements spécialisés dans les rencontres coquines, gays ou libertines, comme le bien-nommé Le Trou (Lyon 1) ou, dans le même arrondissement, Le Sun. Gay du dimanche au mardi, réservé aux libertins (hommes et femmes) les autres jours, c’est tout simplement, avec ses 2800m², le plus grand sauna de ce type en Europe !
Alors, Lyon une ville coincée ? Certainement pas.
Crédits photo : ©jan buchholtzInfos pratiques
Pour approfondir (si on peut dire) le sujet, on se référera avec profit au toujours indispensable Dictionnaire historique de Lyon (publié en 2009 par Patrice Béghain, Bruno Benoit, Gérard Courneloup et Bruno Thévenon aux éditions Stéphane Bachès) et notamment aux articles “Prostitution” et “Homosexualité”.
Par ailleurs, les guides de Cybèle proposent une nouvelle visite thématique, "historique et coquine", de la Presqu'île lyonnaise, de la place des Terreaux au Grand-Hôtel Dieu. Cette visite, joliment intitulée "La Gaule et le mont de Vénus", est proposée jusqu'au 28 juillet (www.cybele-arts.fr).
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