De la prison vétuste à l’université high-tech, ou comment transformer un passé sombre en avenir lumineux. On part à la découverte de ce lieu chargé d’Histoire et d’histoires.
“Ouvrez des écoles, vous fermerez des prisons” disait Victor Hugo. La prison a seulement été déplacée (à Corbas) mais c’est tout de même une transformation symbolique qu'offre à voir le nouveau campus de l’Université Catholique de Lyon.
Installée en lieu et place de l’ancienne prison Saint-Paul à Perrache, l’UCLy n’en est toutefois pas à son coup d’essai. L’université historiquement située dans un hôtel particulier près de la place Bellecour (depuis 1875) a déjà déménagé dans une ancienne caserne place Carnot en 2005. Aujourd’hui c’est un agrandissement, puisque c’est le deuxième campus qui a ouvert place des Archives.
40% des anciens locaux ont été conservés, après une importante rénovation. On observe encore ici ou là des stigmates de la prison comme de lourdes serrures en fonte incrustées dans les embrasures de portes ou des barreaux à certaines fenêtres.
Le projet marie le bâti historique à une structure moderne et lumineuse. Ainsi la rotonde (tour centrale de surveillance à l’époque de la prison) a été conservée. Centre stratégique et administratif d'autrefois, elle reste le coeur de l’Université en devenant le lieu d’accueil général, passage obligé qui dessert l’espace avec ses escaliers rayonnants. La chapelle au sommet a également été conservée et rénovée.
Une rue intérieure est formée, sous une haute verrière offrant beaucoup de lumière. Elle conduit à l’îlot Saint-Joseph à la manière d'une traboule. Au bout, c’est le cours Suchet, là où se trouvait l’entrée de la prison. Le fronton, associant pierre dorée du Beaujolais, pierre rose de Tournus et pierre blanche de Villebois a été conservé. On peut y voir une plaque rendant hommage aux Résistants exécutés dans l’enceinte de la prison en 1944, inaugurée le 12 septembre.
Une prison en étoile
La construction de la prison a été envisagée dès 1847, d’abord dans le quartier Saint-Paul, à proximité du Palais de Justice. C’est finalement dans le quartier de Perrache que le Préfet décida en 1859 de bâtir la maison d’arrêt. A un jet de pierre de la prison pour femmes Saint-Joseph (existant depuis 1831).
L’architecte Antonin Louvier dresse les plans en 1860, suivant une architecture en étoile baptisé plan panoptique. C’est un type d’architecture carcérale imaginée par le philosophe utilitariste Jeremy Bentham articulée autour d'une tour centrale permettant d’observer tous les prisonniers. Les détenus se savent observés sans voir le surveillant, qui n’a donc pas besoin d’être à son poste constamment, ce qui a pour objectif final d’abandonner la surveillance aux surveillés et donc de réduire le nombre d’employés.
Au XXe siècle, l’établissement est réputé pour son insalubrité et sa surpopulation. 900 détenus pour 360 places en février 2008, selon l'administration pénitentiaire. Ce qui donnait jusqu’à quatre détenus par cellule de 9m2, toilettes en open space inclus. La prison fut dès lors surnommée “la marmite du diable” suite à un documentaire réalisé en 2000 pour l'émission Envoyé Spécial de France 2. Les autorités finirent par agir et les détenus furent transférés à Corbas en 2009. Des locaux neufs et spacieux, pourtant moins appréciés car l’isolement social y est trop important.
L’avenir des bâtiments est incertain et la destruction est envisagée mais une importante mobilisation se forme pour les conserver. Le Préfet lance alors en 2010 un concours architectural, remporté par l’UCLy et Habitat et Humanisme. Les architectes Garbit et Blondeau, le studio Ory et l’urbaniste Thierry Roche sont désignés pour réhabiliter les lieux avec leur projet baptisé “la vie grande ouverte”. De quoi donner une nouvelle vie à la marmite du diable !
Crédits photo : UCLy
Infos pratiques
Dates clefs
1865 : Mise en service de la prison Saint-Paul.
2009 : Désaffectation et transfert des détenus à Corbas.
2012 : La prison, vide mais encore en l’état, est ouverte aux visiteurs pendant les Journées du Patrimoine. Ernest Pignon-Ernest et d'autres artistes ont été invités à y intervenir.
2015 : A l’emplacement de Saint-Joseph sont implantés des logements, bureaux, commerces. Saint-Paul est le nouveau campus de l’UCLy.
Adresse : 10 place des Archives, Lyon 2e.
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