Lyonnais pure souche et touristes de passage, tout le monde a déjà visité la cathédrale Saint-Jean. Mais l’avez-vous vraiment bien regardée ?
Tout le monde connaît la cathédrale. À commencer par son architecture particulière, mélange de trois styles : roman, gothique et gothique flamboyant. Cela s’explique par la durée de la construction, étendue sur trois siècles (de 1175 à 1481). Elle possède une importance religieuse indéniable : cathédrale, primatiale... mais les catholiques ne sont pas les seuls à l’adorer.
Ce serait aussi un haut lieu ésotérique. Prenons les médaillons présents sur la façade, entourant les trois portes. Ces 300 petites sculptures carrées illustrent officiellement divers épisodes de l’Ancien et du Nouveau Testament. Mais certains y voient des représentations occultes évoquant “le livre du Grand Oeuvre”. Qu’est-ce que le “Grand Oeuvre” direz-vous ? Il s’agit, pour les alchimistes, de la réalisation de la pierre philosophale. Celleci présente de nombreux interêts, tels que la capacité de changer les métaux “vils” (comme le plomb) en métaux précieux (comme l’or), de guérir les maladies ou encore de prolonger la vie. On comprend donc aisément l’intérêt pour ces sculptures. L’interprétation de ces médaillons est cependant extrêmement ardue, malgré leur bon état de conservation. Certains les comparent à un jeu de l’oie et personne, évidemment, n’a encore reussi à les déchiffrer.
Le long de la porte côté sud, on peut voir par exemple un médaillon représentant quatre lièvres (animal symbole de l’apprenti cherchant la connaissance) dont les corps forment un cercle entourant un carré, ce qui représente la quadrature du cercle, problème insoluble symbolisant la quête infinie de savoir. Plus haut sur la façade, on remarque que tous les anges sont décapités et que des niches sont dépourvues de statues. C’est le Baron des Adrets, calviniste, qui les a détruits au XVIe siècle.
GARGOUILLES ET CHIMÈRES
Si on lève encore plus haut la tête, on aperçoit quelques gargouilles. Il ne faut pas confondre les gargouilles avec les chimères. Les premières sont des personnages grotesques, caractéristiques de l’art gothique, munies d’un bec verseur servant à évacuer l’eau de pluie. Leur but est principalement utilitaire. Mais il en existe sans bec d’évacuation, il s’agit alors de chimères. Celles-ci remontent à l’Antiquité grecque et leur objectif est tout autre.
Créatures fantastiques malfaisantes d’apparence hybride, leur finalité est apotropaïque. C’est-à-dire qu’elles conjurent le mauvais sort, elles détournent le mal et servent finalement à protéger l’édifice. À Saint-Jean, la restauration de la façade a conduit à la réalisation d’une gargouille nommée Ahmed, à l’effigie du chef de chantier, pérpétuant une vieille tradition : glisser des clins d’oeils à ses collègues à travers le décor foisonnant des édifices religieux. Ne manquez pas de lire à ce sujet le billet du père Vincent Feroldi.
C’est loin d’être un cas isolé : la chapelle de Bethléem, en Loire Atlantique, arbore 28 chimères modernes depuis sa restauration en 1993, dont un Gremlins et Goldorak. On a aussi repéré un Alien à l’abbaye Paisley en Écosse et Dark Vador sur la cathédrale nationale de Washington…
D’un coup, notre Ahmed lyonnais parait bien moins farfelu !
Crédits photo : LD
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