Alors que Spot célèbre son centième numéro, on vous propose un voyage spatio-temporel en l’an 100 de notre ère, quand Lyon s’appelait Lugdunum et vivait sa meilleure vie sous la dynastie des Antonins.
Si on vous parle ce mois-ci du Lugdunum de l’an 100 après Jésus-Christ, ce n’est pas seulement un clin d’œil à la numérotation de cette édition d’avril 2019. À cette date correspond à une période faste pour la colonie romaine fondée en -43 par le proconsul (gouverneur) de la Gaule chevelue, Lucius Munatius Plancus. Au IIe siècle, l’Empire romain connaît en effet son apogée, et la ville, capitale des Gaules depuis -27 et peuplée alors de 50 à 80 000 habitants, n’est pas en reste. Mais à quoi ressemblait Lugdunum à cette époque ?
Le cœur de la ville, c’est bien entendu la colline de Fourvière. C’est là que la colonie a été fondée et c’est là aussi qu’on trouve les principaux symboles du pouvoir. Comme dans toute cité romaine qui se respecte, la vie politique et administrative s’articule autour du forum, qu’on peut situer sous l’actuelle esplanade de la basilique. C’est ce « vieux forum » (forum vetus) qui, par déformations successives, aurait donné son nom à la colline qui prie déjà, puisqu’elle abrite un « temple capitolin », dédié à la trinité Jupiter – Junon – Minerve. Celui-ci occupe d’ailleurs… la place de l’actuelle basilique !
Non loin de là où se dresse la tour métallique de communication édifiée à la fin du XIXe s’élevait un palais qui fut la résidence provisoire de plusieurs empereurs (Auguste, Tibère, Caligula, Hadrien…) et même le lieu de naissance de deux d’entre eux : Claude (en -10) et Caracalla (en 188). Mais aujourd’hui, les traces les plus évidentes de ce glorieux passé sont évidemment le Théâtre antique (construit au début de l’Empire, sous Auguste, il connaît justement autour de l’an 100 un agrandissement qui porte sa capacité à 10 000 spectateurs), l’Odéon et le pseudo-temple de Cybèle (plus vraisemblablement le palais du gouverneur).
Quand la Presqu’île, elle aussi, parlait latin
De l’autre côté de la Saône, au pied de la colline de la Croix-Rousse, s’étend le bourg celtique de Condate, qui aurait peut-être été habité par des Gaulois avant même la fondation de la colonie romaine. On y trouve un sanctuaire fédéral dédié au culte de Rome et d’Auguste, dont subsiste aujourd’hui l’Amphithéâtre des Trois Gaules.
Le monument fête d’ailleurs cette année son 2 000e anniversaire, puisqu’il a été édifié en 19, sous Tibère. En l’an 100, il n’a pas encore connu l’agrandissement qui, sous Hadrien (plus précisément entre 130 et 136) portera sa capacité à 20 000 spectateurs ; il n’a pas encore vu non plus le martyre de Sainte-Blandine et Saint-Pothin, qui seront mis à mort dans son enceinte en 177.
Enfin, une troisième zone de population, les Canabaes, se situe au centre de l’actuelle Presqu’île. C’est un quartier commerçant, où on trouve par exemple des négociants de vin. Les archéologues ont longtemps pensé qu’il était constitué par une île (qui aurait depuis disparu) au milieu du Rhône.
Aujourd’hui, cette hypothèse est toutefois délaissée par la plupart des historiens, qui estiment que le quartier était déjà rattaché à la Presqu’île. Des fouilles archéologiques (notamment celles réalisées à l’occasion du creusement du métro A au niveau de la station Ampère) ont permis de mettre au jour les traces (par exemple des mosaïques) d’une domus (villa).
L’apogée que connaît Lugdunum vers l’an 100 n’a toutefois qu’un temps. Dès la fin du IIe siècle, la ville subit les contrecoups des soubresauts qui agitent l’Empire romain. Et, en 297, affront suprême, elle perd sa couronne de « capitale des Gaules » au profit de… Trèves, l’usurpatrice allemande ! Mais peu importent ces péripéties de l’Histoire : pour ses habitants, Lugdunum / Lyon conserve à jamais son titre prestigieux.
Crédits photo : ©Joyce Hong - FlickrInfos pratiques
Pratique : pour tout savoir de cette période faste et fascinante, il faut bien sûr se précipiter à Lugdunum, le nouveau nom du Musée gallo-romain de Lyon, fondé en 1975 juste à côté de l’Amphithéâtre antique et de l’Odéon. C’est là qu’on peut notamment admirer la Table claudienne, découverte en 1528, qui reproduit dans le bronze le discours que l’empereur Claude, né à Lyon, prononça en 48 à Rome, en faveur des Gaulois.
Lugdunum, 17 rue Cléberg-Lyon 5 / 04 72 38 49 30 / www.lugdunum.grandlyon.com
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