Depuis quelques mois, plusieurs projets architecturaux sont sortis des placards. Tous visent à rénover des bâtiments emblématiques pour en faire de riches résidences. De la Bastille au centre haussmannien de Grenoble, petit tour du (nouveau) propriétaire.
Une grande bâche recouvre l’une des façades du 21, avenue Félix-Viallet. Dissimulée par les arbres verdoyants, elle indique un nom : Augusta Conseils. C’est le nouveau proprio de l’ancienne Chambre de commerce de Grenoble (accolée à la bourse du commerce), au cœur du quartier haussmannien.
Ainsi, l’édifice est un concentré de l’art nouveau de 1900. On y découvre de superbes plafonds moulés, et une grande verrière. De plus, la façade conserve des représentations florales, et, évidemment, des allégories de l’industrie et de l’agriculture.
Aujourd’hui, le bâtiment de 4 étages est classé « immeuble d’intérêt patrimonial exceptionnel. » Positionnée entre Berriat, la Gare et porte de France, la chambre est au cœur de la ville, c’est achat judicieux pour la société qui souhaite transformer le lieu en logements haut de gamme.
Pour ce faire, Augusta vend les lots séparément avec une promesse : la défiscalisation. Ainsi, il a fallu 6 ans — et le dépôt de bilan de l’école de commerce Wesford en 2012 — pour que le bâtiment arrête de prendre la poussière. Et les Grenoblois pourront visiter ce symbole industriel du début du siècle ? Évidemment non.
Dolomieu
Depuis la future résidence de luxe, il suffit de remonter de quelques mètres l’avenue Gambetta pour tomber — impossible de les manquer — sur les deux barrières artificielles trônant sur la Bastille : l’Institut Dolomieu (à gauche) et l’institut de géographie alpine (à droite).
Le premier a été vendu en 2011 à un promoteur haut-savoyard pour 1,1 million d’€ quand, en 2016, le bâtiment de l’IGA part pour 729 000 euros. Les deux grands parallélépipèdes rectangles couverts de graffs sont l’emblème de l’abandon récent de bâtiments emblématiques.
Aujourd’hui ouverts aux quatre vents, les deux bâtiments ont pourtant accueilli depuis les années 60 de nombreux étudiants dont on se demande comment ils pouvaient se concentrer dans un cadre à ce point enchanteur, avec cette vue orientée plein sud.
Le CRSSA
À un jet de pierre de la Bastille, un complexe autrement plus vaste attend d’être réhabilité : le CRSSA, Centre de recherches du service de santé des armées. L’on sait peu de choses sur ce qui s’y passait du temps des militaires, seulement qu’ils bossaient sur des produits « P4 » (pathogène de classe 4), comprendre très très dangereux.
Il disposait d’un budget de plusieurs millions d’euros par an. Depuis 2008, les huit bâtiments cachés derrière les hauts murs du 24, avenue Maquis du Grésivaudan à La Tronche attendent. La végétation a repris tranquillement sa liberté (ici un arbre pousse sous un proche. Là un escalier est recouvert par un buisson) quand — curiosité à Grenoble — aucun tag n’a encore fleuri sur les murs.
Cet ensemble de la fin du XIXe, quand la ville décide de transférer certains services à l’extérieur de la ville, comme les hôpitaux. L’hôpital militaire l’y suit en 1911. Le développement de l’hôpital de Grenoble reprend avec l’extension de bâtiments existants après la Première Guerre mondiale.
Aujourd’hui, la Métropole veut remettre la main sur cet héritage et compte sur l’increvable « mythe » grenoblois pour le régénérer. « Il va y avoir 214 logements, mais aussi des labos de l’université et des start-ups associés », explique le maire, Bertrand Spindler.
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