Visiblement, à Lyon, il n’y a bien que les amateurs de football qui semblent allergiques à la couleur verte. À voir les queues monstrueuses de Lyonnais lors de ventes éphémères de plantes, le besoin de verdir son environnement, à domicile ou à l’extérieur, se fait ressentir. Et cela tombe bien, les possibilités pour atteindre cette objectif sont multiples à Lyon et dans l’agglomération.
Samedi 10 février, 9h. Devant l’entrée de la boutique In Sted (Lyon 3e), c’est l’effervescence. Une foule nombreuse et disciplinée fait la queue. C’est presque un euphémisme de l’écrire tant les Lyonnais sont venus en masse.
À 11h du matin, la file d’attente faisait plus de cent mètres et se poursuivait en longeant le pâté de maison de la boutique. On dénombrait plus de 300 personnes faisant le pied de grue. Impressionnant, en plein cœur de l’hiver.
PRIX BAS ET CENTRE-VILLE
La raison de ce joyeux attroupement : la troisième vente éphémère de plantes organisée par le collectif Plantes Pour Tous. “J’étais allée à la première vente en décembre, au Village des Créateurs (Lyon 1er), mais j’ai été découragée par la longueur de la queue.
Alors ce matin, je suis arrivée à 8h pour être sûre de ne pas trop attendre” sourit Julie en sortant de la boutique avec une plante dans chaque bras. Dans la file, certains sont venus plus tard mais relativisent. “On avait attendu près de trois heures la première fois tellement il y avait de monde. Là, dans une heure, on devrait y être” espèrent Mathieu et Julie, un couple de Lyonnais venus acheter les premières plantes de leur appartement.
Depuis décembre, l’engouement autour de ces ventes éphémères ne ramollit pas. À tel point qu’à Lyon, deux collectifs se sont montés et organisent, chacun de leur côté, une vente par mois. Ils se nomment Maison Bouture et Plantes Pour Tous.
Lancé initialement à Paris en juin dernier par Plantes Pour Tous, le concept de ces ventes a tout de suite plu et a vite fait des petits en France et, évidemment, à Lyon. Derrière ce collectif se retrouvent une bande de concepteurs-paysagistes tous diplômés de l’École Supérieure d’Architecture des Jardins de Paris.
“Lors de notre première vente, nous avons été dévalisés. Dimanche midi, nous n’avions plus aucune de nos 7000 plantes. On a vite compris qu’il faudrait multiplier les rendez-vous, trouver un espace plus grand et ramener plus de plantes” sourit Sophie Anaf, l’une des responsables de Plantes Pour Tous Lyon. Pour la jeune femme, “on constate une vraie mode autour des plantes. Il y a un engagement. Les gens veulent du vert chez eux. Malheureusement, ce n’est pas toujours accessible financièrement et les magasins sont très souvent excentrés.” C’est là que Plantes Pour Tous et Maison Bouture tirent leur épingle du jeu. Avec des coûts structurels réduits, les deux collectifs peuvent proposer des plantes deux fois moins chères qu’en grande surface spécialisée, voire trois fois moins chères que chez le fleuriste.
Comme chez ces professionnels, les plantes proviennent majoritairement de Hollande et d’Espagne (cactus et succulentes). L’autre atout des ventes éphémères : le centre-ville ! “Je n’ai pas de voiture. Si je devais sortir de Lyon pour ramener des plantes, ce serait une galère sans nom” explique Julie.
Une organisation qui porte toujours ses fruits. Du côté de Plantes Pour Tous, la vente de février a permis d’écouler cette fois plus de 10 000 plantes. En mars, une autre devrait avoir lieu en Presqu’île et le collectif devrait également poser ses étagères pleines de plantes à Grenoble pour la première fois.
REPRISE EN MAIN
La passion des plantes ne semble pas circonscrite au domicile des Lyonnais. Depuis quelques années, certains se retroussent les manches pour remettre plus de verdure dans leur cadre de vie. Par exemple, c’est le cas de l’association lyonnaise Brin d’Guill, installée au cœur du quartier de la Guillotière. “L’association a été lancée en 2002 à l’initiative de familles du quartier qui estimaient que leur environnement manquait de plantes” raconte Gaëlle Tribut de Brin d’Guill.
L’association de 70 membres gère notamment le jardin d’Amarante depuis 2007, mais ce n’est pas tout. Chaque semaine, Gaëlle est sollicitée par des habitants du quartier pour mettre en place des composteurs collectifs. “On ressent clairement depuis quelques années un véritable besoin de verdir son espace de vie intérieur et extérieur” ajoute la salariée de Brin d’Guill.
Parmi ses nombreuses activités, l’association a notamment encadré une quarantaine de “Petits brins zurbains”. Derrière cette formule se cachent des microimplantations florales. “Philosophiquement, les micro implantations florales incarnent une reprise en main concrète des habitants sur leur cadre de vie” résume Gaëlle Tribut.
Concrètement, lors d’une micro-implantation florale, on découpe (avec l’aval de la Ville et de la Métropole) une partie du revêtement d’un trottoir pour littéralement y insérer de la terre dans laquelle les habitants planteront des végétaux. Lancée en 2005 par la Ville de Lyon, cette initiative cartonne. Lyon compte pas moins de 900 micro-implantations de ce type sur son territoire. “Cette pratique plaît énormément. Aujourd’hui, nous réalisons près de 100 micro-implantations par an contre 70 il y a un ou deux ans” raconte Elsa Laubez, la coordinatrice des projets de jardinage participatif à la Ville de Lyon.
RÔLE SOCIAL ET ENVIRONNEMENTAL
Les micro-implantations ne sont qu’une des possibilités des Lyonnais pour rendre leur ville plus verte. “Ce mouvement est évidemment soutenu par le nombre important de sujets écolos dans les médias et par la sortie de documentaires en faveur de la protection de l’environnement comme Demain, qui ont marqué les gens. Les habitants ont pris conscience qu’ils pouvaient agir à leur échelle” explique Elsa Laubez.
Lyon compte par exemple 45 jardins partagés et il s’en ouvre entre 3 et 5 par an. Parmi les autres solutions accessibles aux Lyonnais : le jardinage au pied des arbres ou dans les parcs ou squares.
“Je reçois de plus en plus de demandes en ce sens depuis deux ans. Mais depuis un an, les habitants demandent énormément la mise en place de bacs pour cultiver des plantes comestibles. Les habitants sont séduits par l’aspect écologique de ce type de jardinage mais pas uniquement. L’aspect social est également plébiscité, ces jardins créent du lien et de la convivialité entre les habitants de chaque quartier” assure Elsa Laubez.
Ces démarches demandent généralement beaucoup d’allers-retours administratifs afin d’obtenir des autorisations pour intervenir sur l’espace public.
Pour faciliter les choses, la Ville et la Métropole travailleraient activement à la mise en place d’une sorte de “permis de jardiner” comme celui qui a été créé à Paris.
Ce genre d’actions menées conjointement par les habitants et les collectivités contribuent à mettre Lyon et son agglomération sur la première marche du podium du plus grand nombre de mètres carré d’espaces verts par habitant, à égalité avec Marseille*.
*étude menée par l’Union nationale des entreprises du paysage en 2017.
Crédits photo : PPT
Infos pratiques
Plantes Pour Tous www.facebook.com/plantespourtouslyon
Maison Bouture www.facebook.com/maisonbouture
Brin d’Guill http://brindguill.org
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