On peut le dire maintenant, Lyon a toujours eu un côté « En Marche ». Contrairement à nos confrères, pas un mot sur le chouchou de Collomb. Ici, nous préférerons les marches en pierre dure, foulée depuis des siècles par nos aïeux : de celles qui ont une histoire à raconter.
La place Bâtonnier Valensio, tout près de Saint-Georges (Lyon 5e) est chargée de ces souvenirs lyonnais. Notre premier escalier attend, sagement. Composé d’acier corten — il a la particularité de s’oxyder « volontairement » — et un peu rouge de rouille, l’escalier répond à chaque pas du visiteur d’un tintement métallique. À notre droite, on découvre une végétation touffue et apaisante dans ce vieux centre dense. À mi-chemin, on devine sur la place derrière nous des lignes traçant l’ancien plan des immeubles qui s’élevaient sur la place.
Le Manoir catho
Une fois l’ascension terminée, on atteint la rue Caillat et, à droite, la montée du Gourguillon qui offre un spectacle beaucoup plus religieux, avec le mur d’un ancien couvent, et une inscription au-dessus d’une grille blanche : « Le Manoir ». Francia Godet est la seule Lyonnaise à évoquer ce lieu dans son livre La Traille. Elle y décrit sa venue dans les années 50, lorsqu’elle était à l’école pour fille de Saint-Just : « une fois franchie cette première porte, il fallait ensuite gravir les escaliers extérieurs (encore ! NDLR) avant d’arriver à la salle du Manoir jouxtant une chapelle. »
La chute du pape
Preuve est faite que la montée est teintée de catholicisme. Un secret vieux de 712 ans y loge d’ailleurs. En novembre 1305, le pape est couronné dans la cité lyonnaise. Comme il fait froid ce jour-là, Clément V, nouveau et prévoyant pontife, a ramené vingt tonneaux de vin de Bordeaux. Le Saint-Père déambule dans la ville au côté du Roi, suscitant l’intérêt dans la montée du Gourguillon. Tellement que, tout à coup, un pan de mur s’effondre et emporte vingt badauds dans la coulée. Comme l’Histoire avec un grand H se souvient plutôt des fortunes au poids écrasant, elle retient que le pape y perd une pierre précieuse. Faisant Fi du petit peuple, le souverain pontife reprend sa marche. La légende raconte que le précieux caillou est encore caché dans la montée.
De riches escaliers
Des marches, il n’en manque pas dans le reste du Vieux Lyon. Mais pour sortir de ces ruelles décrites comme interlopes (en 1900, Félix Desvernay, dessinateur dans le Progrès illustré parle " d'un enchevêtrement inextricable des maisons qui s’étagent sur la colline […] un endroit prédestiné aux affaires mystérieuses et romanesques »), on préfère se rendre dans le quartier des marchands, du côté de Saint-Paul.
Au XVe siècle, sans Rolex pour se démarquer, les riches commerçants se la racontent grâce à leurs escaliers. C’est ainsi qu’au 10, rue Lainerie se planque un escalier en colimaçon étrange. Sa particularité ? Il ne dispose pas d’axe central faisant de sa colonne vertébrale un tire-bouchon de pierre.
Enfin, les dernières marches sont les plus massives, du côté d’Hôtel-de-Ville, et de nouveau appartenant à des culs bénis : l’escalier des Feuillants, datant du XVIIe. Ce couvent accueillait des moines vivant de la mendicité qui ont finalement réussi à se payer ce chef-d’oeuvre de 22 m, tout en pierre calcaire. Comme quoi, les généreux donateurs étaient déjà au rendez-vous pour se mettre en marche.
Crédits photo : JB AuducInfos pratiques
L'escalier des Feuillants (Lyon 1er) est accessible par la traboule de la rue du Thau ou par le 6, Petite rue des Feuillants, avec sa porte monumentale.
Quelques bonnes adresses alentours pour se remettre de cette bonne marche :
- Un resto sympa : L’Ourson qui boit au 23 rue Royale (Lyon 1er).
- Un petit café : au Café du Soleil, lieu mythique du Vieux Lyon, au début de la montée du Gourguillon (Lyon 5e).
- Le bar à vin la Coulée Douce, au 4, rue de la Fronde, proche du 10 rue Lainerie (Lyon 5e).
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