Une petite cabane perdue au milieu de la montagne, difficile d’accès, réservée à des alpinistes aguerris. L’image classique véhiculée sur les refuges ne correspond pourtant pas à la grande majorité de ces abris où les randonneurs trouvent souvent bien plus qu’un toit pour la nuit. Lieux de rencontres et de convivialité, ils sont une porte ouverte sur la nature, une incitation à venir s’immerger en montagne.
« Quand on habite en centre-ville comme moi, il est rare de pouvoir profiter pleinement d’un beau coucher – ou lever – de soleil, parce que celui-ci se retrouve vite masqué par les immeubles. Lorsque je monte en refuge, j’ai tout loisir de profiter de ce moment magique, sans rien pour me boucher la vue.
Et je n’ai pas eu besoin de partir très tôt le matin ou de redescendre à la frontale pour vivre ces quelques minutes de bonheur », explique Guillaume, un Grenoblois de 39 ans, passionné de randonnée pédestre et plus généralement de montagne. Ce sont des petits bonheurs simples comme celui-ci qui s’ouvrent à vous lorsque vous allez passer une nuit en refuge.
Ce sont des petits bonheurs simples comme celui-ci qui s’ouvrent à vous lorsque vous allez passer une nuit en refuge.
« Ce que j’apprécie le plus, c’est le rythme de la vie en refuge : on est en dehors de la frénésie de la vie quotidienne. C’est un endroit où on peut se poser, vraiment. On n’est pas une optique de rentabilité, où il s’agit de faire le plus de choses possibles dans le plus court laps de temps, comme ça peut parfois être le cas dans notre vie de tous les jours, en ville.
C’est un milieu qui permet d’apprécier les choses simples, et à leur juste valeur. J’avais donné un coup de main, un été, à des amis qui gardaient un refuge dans le Queyras. On l’atteignait après plusieurs heures de marche.
Lorsque des randonneurs arrivaient et qu’on leur offrait un siège et un verre d’eau bien fraîche, ils étaient les plus heureux du monde. Il y a dans le refuge un côté ressourcement et retour à la simplicité », estime Carine, 40 ans, pratiquante de randonnée « pas régulière – c’est quand j’ai le temps et qu’il fait beau – et principalement en moyenne montagne ».
Le refuge : une incitation à venir dans la nature
Encore faut-il pouvoir accéder aux refuges, ce qui est loin d’être donné à tout le monde, rétorquent les mauvaises langues. « Sur les 350 refuges en France, il n’y en a que dix situés au-dessus de 3000 m d’altitude, qui s’adressent donc quasi-exclusivement à des alpinistes aguerris.
Mais on trouve aussi beaucoup de refuges entre 1500 et 2000 m, notamment en Isère. Ils sont souvent assez faciles d’accès. Certains ne se trouvent même qu’à une demi-heure de marche d’une route », précise Frédi Meignan, gardien du refuge du Promontoire (au pied de la Meije, à 3100 m d’altitude, ce qui en fait le plus haut refuge de l’Isère) et président de l’AGRI, l’Association des Gardiens de Refuge de l’Isère.
Il ne faut pas non plus oublier que bon nombre de ces refuges sont gardés, et proposent la demi-pension. Autrement dit, ils permettent de partir à la découverte d’un milieu sauvage – la montagne – tout en bénéficiant d’un certain confort, ce qui n’est pas forcément le cas du camping sauvage. « Le refuge gardé, c’est comme une main tendue, une incitation à venir dans la nature, avec un côté rassurant », résume Frédi Meignan.
Ce n’est pas Carine qui va contredire ce dernier, elle qui adore emmener ses enfants (11 et 13 ans) dormir en refuge : « Je sens qu’ils s’amusent lors de ces balades. Ils aiment bien découvrir la faune et la flore lorsqu’ils marchent. Et une fois arrivés au refuge, je les sens à l’aise, dans un univers simple. Je leur permets de prendre la tablette, mais au final ils l’utilisent peu, parce qu’ils peuvent faire plein d’autres choses. On peut par exemple les laisser jouer au bord du ruisseau sans être tout le temps à les surveiller. Ils sont contents parce qu’ils jouissent d’une certaine autonomie, peuvent faire leurs expériences tout seuls. Et en même temps, nous, parents, sommes vraiment disponibles pour eux, sans doute davantage que lorsqu’on est à la maison. On va faire plein de petites balades autour du refuge, aller cueillir des plantes pour la soupe du soir… C’est un moment familial privilégié, qui permet de se retrouver vraiment ».
Le gardien : un interlocuteur privilégié
Le contact humain, d’une façon générale, est privilégié lorsqu’on arrive en refuge. « Il y a eu un gros effort de fait pour améliorer l’accueil ces dernières années. Aujourd’hui, le gardien de refuge n’est pas là simplement pour servir les repas. L’accueil, c’est de l’écoute, du partage, de l’explication. La plupart des gardiens de refuge sont des doubles actifs : saisonniers en stations de ski, accompagnateurs en montagne, moniteur d’escalade…
Bref, on baigne dans l’univers de la montagne quasiment toute l’année, et on a envie de le faire découvrir aux randonneurs. On n’a pas du tout le même rapport aux éléments naturels que les citadins. On vit beaucoup plus avec la météo, on a davantage conscience que l’eau ou l’énergie sont précieuses. Pour nous l’extérieur n’est pas qu’un décor. On apprend à détecter, à lire, à regarder la montagne. Nos cinq sens sont très stimulés en montagne. On a envie de faire partager ça », explique Frédi Meignan.
Le gardien de refuge est ainsi un interlocuteur privilégié pour le randonneur. « J’ai beau préparer mes randonnées sur une carte IGN pendant de longues heures, il n’est jamais évident de se rendre compte de ce que ça va donner exactement sur le terrain. Il m’est souvent arrivé, après avoir discuté avec un gardien de refuge, de changer l’itinéraire que j’avais initialement prévu, parce que ce gardien m’a indiqué qu’il était préférable d’emprunter tel côté du vallon, qu’en passant sur tel autre sentier le panorama était plus sympa, etc », détaille Guillaume.
Et quid de la promiscuité et du confort « spartiate », deux critiques souvent entendues à l’égard des refuges ? « De nombreux travaux de rénovation ont été entrepris dans les refuges. On trouve de plus en plus souvent des chambres de quatre ou cinq lits, plutôt que des grands dortoirs. Il n’est désormais pas rare d’avoir des couettes, plutôt que la vieille couverture en laine qui gratte. Il y a généralement plus de confort aujourd’hui, à l’image des douches chaudes, qui sont plus fréquentes que par le passé », assure Carine.
Bref, vous n’avez plus aucune excuse pour ne pas oser le refuge et découvrir « un espace de respiration pour déstresser et déconnecter », comme le dit joliment Frédi Meignan.
« Les 1001 nuits des refuges »
Du 15 juin au 15 septembre, les refuges isérois vont s’animer, à l’initiative des gardiens de refuge. À travers ces « Mille et une nuits des refuges », le public pourra découvrir que les refuges sont d’abord des lieux de convivialité ouverts à tous.
Des professionnels d’horizons divers (botanistes, guides, musiciens…) viendront à la rencontre des randonneurs pour leur faire découvrir la montagne sous un jour nouveau. « Nous espérons avoir une centaine d’animations tout au long de l’été.
Avec toujours cette idée de faire partager au public les choses fortes que nous vivons au quotidien », explique Frédi Meignan, président de l’AGRI, l’Association des Gardiens de Refuge de l’Isère. Au programme : des concerts, projections, soirées, ateliers sur des thématiques variées (voyages/expé, botanique, écologie, peinture, bien-être, sports extrêmes…).
Cette nouvelle initiative s’inscrit dans la lignée des « Jeudis des Refuges de l’Oisans » (JRO), lancés sur le même principe il y a déjà quelques années. La musique est la thématique 2016 de ces JRO. À noter aussi des tarifs spéciaux en demi-pension à cette occasion : 15 € pour les moins de 8 ans, 25 € pour les 8-18 ans et 35 € pour les adultes.
Crédits photo : Images et rêves
Infos pratiques
http://www.isere-tourisme.com/selection/refuges
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